D’île en île, une semaine de littératures insulaires
5 juin 2007 de 18h30 à 9 juin 2007 de 23h59
Ciné-lecture mardi 5 juin à 19h Polygone étoilé
avec Vinod Rughoonundun (Ile Maurice) lectures poétiques par l’auteur et par la comédienne Isabelle Randrianatoavina
projections des films mauriciens de David Constantin > Colas, le dictionnaire (Maurice , 2003, 16 mn)
Colas, pêcheur à l'île Maurice, partage son temps entre la pêche et la lecture, entre la mer qui ne lui rapporte presque plus rien et son vieux dictionnaire qui lui apporte tellement plus… > Bis an vil (Maurice, 2005, 14 mn) : Voyage en autobus à l’Ile Maurice un jour de foire..
Café littéraire comorien mercredi 6 juin à 19h L’Oasis marseillais
avec Soeuf Elbadawi, Nassuf Djailani et Fahoudine M’zé
Table ronde Insularités, écritures et représentations
jeudi 7 juin à 19h Bibliothèque Départementale de Prêt
avec les écrivains Gary Victor (Haïti), Gisèle Pineau (Guadeloupe), Virginie Buisson (Nouvelle-Calédonie), Marcu Biancarelli (Corse), Raharimanana (Madagascar), Nassuf Djailani (Comores) et l’éditrice Jutta Hepke (Editions Vents d’ailleurs).
Quelle(s) langues(s) inventent les écrivains pour dire leur île ? Pour dire les imaginaires insulaires au regard des mouvements antagonistes qui agitent les “îliens”, entre repli identitaire et espace d'ouverture, entre un imaginaire nourri par le rêve ou l'exotisme et celui qui porte les traces de la misère ou de l'enfermement, entre la préservation ou l'invention d'une langue ?
Rencontres littéraires Librairie Histoire de l’Œil
vendredi 8 juin à 19h avec Gary Victor (Haïti)
vendredi 9 juin avec Gisèle Pineau (Guadeloupe)
Ateliers d’écriture les 6, 7 et 8 juin, de 16h à 18h
Bibliothèque Départementale de Prêt
animés par l’écrivain Virginie Buisson (à suivre à la séance ou en totalité)Les auteurs invités
C’est en mutualisant leurs forces et leurs compétences que deux associations, Lectures du Monde et Peuple et Culture Marseille, présentent cet événement littéraire au public marseillais. C’est aussi en multipliant les partenariats qu’elles accueillent aujourd’hui, en divers lieux et sous diverses formes, des écrivains originaires d’îles francophones dont certaines, comme la Corse et les Comores, sont fortement représentées sur le territoire marseillais. Nous affirmons ainsi, au-delà du plaisir de découvrir et de rencontrer, notre désir de susciter des échanges entre les diasporas, et, ensemble, de fabriquer un langage avec tous les langages pour dire les identités et les imaginaires insulaires.
Pour aborder la manière dont ces langages se posent dans l’écriture et s’élaborent dans la littérature, nous avons invité des auteur(e)s qui tou(te)s affirment le pouvoir de la création littéraire : maintenir la possibilité d’un espace de réelle liberté, d’un lieu de résistance. Tous présentent des œuvres ayant une fonction militante mais dépassant et transformant, par l’étendue de leurs différents registres, le cadre des affrontements historiques et leurs absurdités. Parce que nous pensons que ces littératures peuvent révéler que l’esclavage, les colonisations, les violences, les peurs héritées du passé, sont des douleurs qui enseignent l’échange et le partage, à tout le moins le désir, ainsi qu’une exigence avide de dignité. Parce qu’elles ont la volonté de partager les vérités de tout passé commun avec la France, mais aussi celle de partager les responsabilités à venir, d’estimer ensemble la marche commune dans une sensibilité au réel, dans des identités relationnelles et des cultures de la présence au monde. Dans la juste posture, ouverte et fluide, donnant capacité à se changer en échangeant, de façon à ce que chacun puisse participer de son origine et ne pas se figer, comme le dit Edouard Glissant, « dans des cultures du retirement ». Pour la reconnaissance d’une interpénétration des cultures et des peuples, sans qu’il y aille de la dissolution ou de la déperdition des personnes mises en contact. Pour une véritable « politique de la Relation ».
Ta table ronde : Insularités, écritures et représentations
« la langue qu’on écrit fréquente toutes les autres » – Edouard Glissant
Entre repli identitaire et protectionnisme d’un côté, et espace d’ouverture, d’influences et d’échanges, de l’autre ; entre un imaginaire nourri par le mystère, le rêve ou l’exotisme d’un côté, et la figure de l’île maudite portant les traces de la misère, de la dictature ou de l’enfermement, de l’autre, quel(s) langage(s) inventent les écrivains pour dire leur(s) île(s) ? En quelle langue, pour dire la présence en eux d’autres langues ? Quels (r)apports et quelles bigarrures mettent-ils en jeu pour fabriquer et adresser ce qu’on pourrait appeler des « littératures de la cohabitation culturelle » ?
Les auteurs invités
Vinod Rughoonundun
Mauricien d’origine indienne, il a été enseignant et journaliste avant de se consacrer pleinement à l’écriture. Il publie en 1993 Mémoire d’étoile de mer, texte poétique unanimement salué par la critique comme porteur du plus beau souffle. Suivent La saison des mots et Chair de toi, premier texte érotique et sensuel de la littérature mauricienne, qui part à la recherche des correspondances entre corps et verbe, et où la poésie ignore les habitudes imposées de l’espace et du temps. Les éditions Naïve rééditent en 2006 Daïnes, nouvelles fantastiques qui évoquent la mort sous des aspects inédits et aberrants, et condensent les dilemmes réels des sociétés multiculturelles en devenir.
Soeuf Elbadawi est né en 1970 à Moroni, Comores. En 1992 il s’installe en France pour des études de lettres modernes. Aujourd’hui il partage son temps entre Paris et Moroni. Journaliste engagé il collabore à RFI, écrit pour les revues Africultures, Riveneuve Continents et depuis 2005 pour Kashaki aux Comores. Il est aussi producteur de musique, réalisateur de film, cf. « Moroni Undroni Mndroni ». Il dirige depuis 2006 le Komor4 Festival un rendez-vous festif des « iles situées en mer indianocéane » en infatigable agitateur et passeur culturel. Ecrivain il coorganise avec J.L. Raharimanana le recueil « Dernières nouvelles de la Françafrique » (Ed. Vents d’Ailleurs). Et publie en 2007 chez Bilk § Soul « Moroni Blues ; Chap.II », livre-manifeste contre le repli identitaire, empruntant à la fois à la poésie, à l’image, à l’anthropologie, à l’histoire.
Nassuf Djailani appartient à la créative et toute jeune génération comorienne émergente. Né à Mayotte (Comores) en 1981, après des études secondaires à Marseille, il part à Bordeaux pour des études d’histoire et de journalisme. Actuellement pigiste pour la radio, la télé et la presse écrite. A son actif d’écrivain, deux recueils poétiques : Spirale et Roucoulements (grand prix littéraire de l’océan indien). Il est aussi l’auteur d’un petit livre de nouvelles, Une saison aux Comores, où il décrit avec humour et tendresse les charmes et les travers de la société comorienne. Edité par Komedit (maison d’édition comorienne).
Fahoudine Ahamada-M'zé
Autre jeune pousse prometteuse de la créativité comorienne, Fahoudine Ahamada-M’zé est né en 1980 à Ouzioini aux Comores. Après des études secondaires à Marseille il est actuellement étudiant en licence de philosophie à Aix-en-Provence. Il est l’auteur d’un premier roman prometteur et rageur sur le sort confisqué des jeunes filles comoriennes et par ricochet celui des garçons « La secte de la virginité » publié aux editions Kwanzaa ( Saint Michel L’Observatoire) . Son prénom d’écrivain Fahoudine est aussi celui de l’un de ses personnages dont il a programmé la mort dans la suite de « quelques livres à venir ».
Virginie Buisson
Géographe de formation, historienne de coeur, auteur de récits forts sur sa jeunesse en Algérie, la Nouvelle-Calédonie est l’autre versant de sa mémoire. Chargée de mission du gouvernement Rocard pour l’insertion des jeunes en Nouvelle-Calédonie de 1988 à 1995, elle publie en 2001 un essai capital, Lettres retenues, correspondances censurées des déportés de la Commune en Nouvelle-Calédonie, remarquable travail d’archives d’où surgit une puissance romanesque infinie. Commissaire d’expositions (Les proscrits, Billet de passage), réalisatrice d’émissions radiophoniques pour France Culture, elle collabore à des projets théâtraux en résidence et anime de nombreux ateliers d’écriture.
Jean-Luc Raharimanana
Son œuvre tire son origine à la fois des histoires et légendes que racontait son père, professeur d’Histoire, et des images de violence, de misère et de mort, dont il a été témoin direct dans le Madagascar de son enfance. Une langue piétinante, haletante, rageuse, qui conserve le souffle et le rythme de sa langue maternelle, mais aussi un ton lyrique et fiévreux saisissant, marquent ses recueils de nouvelles (Lucarne, Rêves sous le linceul) et son premier roman. Exilé en France depuis 1989, il enseigne, conte, collabore à plusieurs revues, et signe L’arbre anthropophage, un essai d’envergure remarqué. Son dernier livre, Madagascar 1947, est publié aux éditions Vents d’ailleurs.
Marcu Biancarelli
Originaire du sud de la Corse, il enseigne la langue corse au lycée de Porto-Vecchio, et il écrit en corse. Auteur de poésies, de nouvelles et d’un roman, il met en scène des vies insulaires ou des situations extrêmes empruntées à des situations historiques et à toutes sortes de pays dans le monde, dans une écriture vive et crue charriant l’angoisse de l’enfermement, des impasses, des médiocrités, et interrogeant la fascination pour la violence. Pour ses deux recueils de nouvelles, Prisonnier et Saint Jean à Patmos, il a obtenu le prix du livre insulaire d’Ouessant en 2000 et 2002. Publié en édition bilingue chez Albiana à Ajaccio.
Gary Victor est né en 1958 à Port-au-Prince (Haïti) où il réside toujours. Agronome de formation, il exerce ensuite le métier de journaliste : presse écrite, émission de radio, feuilletons télévisés. Il est l’un des romanciers les plus lus en Haïti. Il porte un regard lucide et sans complaisance sur la société haïtienne et il a développé dans ses romans le concept de « réalisme imaginaire » qui lui semble être au cœur de la complexité de la politique et de la vie hallucinée de ses concitoyens. Il a publié tous ses romans à compte d’auteur en Haïti jusqu’à leur reprise par les éditions Vents d’Ailleurs : A l’angle des rues parallèles (Prix Fiction Ouessant 2003) ; dernier roman paru, Les cloches de la Brésilienne. Goncourt pour le prix des lycéens 2007.
Gisèle Pineau est guadeloupéenne, née à Paris en 1956. Sa grand mère paternelle venue de la Guadeloupe lui raconte en créole l’île « papillon » et sa mythologie. Revenue en métropole en 2000, après vingt ans passés aux Antilles où elle a travaillé comme infirmière en psychiatrie, elle s’installe de nouveau à Paris. Ses romans, depuis La grande drive des esprits publié en 1993, sont peuplés de fantômes et de regards portés sur son île : scènes de voyages, expériences de l’exil et de la différence, secrets de famille et vies brisées, chair et épaisseur des personnages, destins singuliers cent cinquante ans après l’esclavage. L’apport créole traverse la langue française et le dernier roman publié en 2007, Mes quatre femmes, se souvient de ces femmes d’un autre temps dont elle est l’héritière.